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Le Partage

 


Tu te donnes

Dès le début, c’est ton corps, devenu matière créatrice, pâte à sculpter l’autre, 

Corps devenu tanière, grotte, atelier du peintre dans le noir

Travail aveugle dans cet espace intérieur calfeutré, 

petite chose lovée au plus secret, au plus profond dont tu n’as aucune idée

Petite crevette, insecte suceur, se nourrissant de ta chair et ton sang

Et ça perdure longtemps

Quand tu lui donnes cette partie de toi

Et ça te déchire pour mieux vivre respirer au grand air

Afin que le monde entier témoigne de ton oeuvre grandiose, la vie

Celle dont on ne fait plus aucun cas

Dont tu n’es pas si certaine de vouloir te charger 

C’est un partage de soi à sens unique

tu la nourris à ton corps même encore pour longtemps, cette vie

Si tu y crois, si tu as ce temps 

Siphons sur des mamelles finalement asexuées, nourricières simplement

Comme il se doit

C’est de ton corps en partage dont il est question

Territoire colonisé désormais à jamais, ou du moins pour longtemps

assujeti aux besoins de cet autre pour un temps indéterminé

Tant qu’il en aura besoin

Tant que tu le pourras, le voudras

Corps char d’assault

Tireur d’élite sur la ligne de feu

Couverture d’appoint

Feu bienfaisant ultime recours refuge abri 

Tu es là pilier immuable

Que tu y crois ou pas c’est valable jusqu’à ce que l’un des deux en décide autrement …

Et ça, rompre ce partage de soi, est souvent très difficile même si nécessaire

Peut-être plus difficile si nécessaire

Pixabay


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