Ava prépare les chiffons laissés par la commère. Elle les coupe, les coud, en fait des habits soyeux et doux pour en vêtir cet être fabriqué par ses mains magiques. Le vrombissement reprend de plus belle, plus près de la cabane cette fois. Les animaux de la forêt se cachent là où ils le peuvent, qui dans un tronc, qui dans un terrier, qui sous une feuille ou sur une branche. Ava est seule avec son petit personnage inanimé quand Hier fait irruption dans la clairière, chevauchant un véhicule tout terrain dégoulinant de boue et de vestiges arboricoles. Le voilà donc, c’est lui, le chasseur qui, de dépit, saccage les lieux.
Le petit être fabriqué avec des éléments provenant de tous pend toujours à la branche du plus vieil arbre de la forêt. Sa paroi extérieure doit devenir dure comme la pierre, solide comme le roc alors que son centre demeure tendre comme le beurre frais afin que le charme puisse être évoqué. Sa fonction sera de rappeler au chasseur qu'il fait lui aussi partie de ce monde, qu'il est un membre de ce clan, qu'il l'accepte ou non, qu'il est au milieu de cette relation collective et non pas à sa périphérie ou au-delà. Ce qu'il doit réaliser, c'est la nature perpétuelle de ces échanges où chacun donne ce qui est nécessaire à l'autre sans jamais user de cruauté ou de gourmandise. L'univers survit dans un va-et-vient constant de gains et de pertes, en équilibre, toujours. Son inconscience menace cette harmonie et on ne le laissera pas faire ça.