Manger pour vivre

 Pour le rappel, revoici les thèmes abordés en ce mois de décembre qui commence en lion dans mon patelin glaçé... -15C ce matin encore, il est tôt en saison pour de tels chiffres dignes d'un congélateur!

Aujourd'hui, on aborde donc la nourriture... 

—      -- Finis ta soupe!

—      -- Finis ton assiette!

—      -- Et le jambon, tu ne le manges pas?

—      -- Quel gaspillage! Allez, termine -moi ça au plus vite, tu ne sors pas de table avant que ton plat ne soit vide!

—      -- Pense aux enfants qui n’ont rien à manger, ingrate!

 

Pleurs, cris, nausées, déglutitions laborieuses.  C’est ça, mon rapport à la nourriture, dans l’enfance, un combat deux fois par jour.

Je n’aime rien, tout me dégoûte.  La chair animale, striant l’assiette de petites veinules sanglantes, me blesse au plus profond de l’âme.  Je ne peux pas manger ça.  Les yeux de la vache crevée pour me nourrir sont une accusation pesant lourd sur ma conscience naissante. Les contours de gras, dont plusieurs raffolent, ont une texture abominable, entre le mou et le ferme, un goût douteux, entre le salé et le vomi que je génère malgré moi. Et le porc, j’ai lu que cet un être très sensible, un peu comme un chien, on peut lui apprendre des choses, des comportements précis… pourquoi le manger? Ce rose est une gifle à tous les roses du monde.

 Et les os… oh les os !!! Les voir sur l’assiette fleurie me renvoie à ma mort toujours possible, dans la minute, tout de suite, là maintenant, squelette se mouvant sous mes muscles… ou dans longtemps. Épée de Damoclès menaçante pour tous, mais dont nuls ne semblent jamais se soucier… Ils font comment, pour n'y jamais penser?

Les fruits, les légumes passent encore… pas trop cuits quand même, on ne veut pas de purée… mais encore là, c'est brimer une vie dont on ne connait rien... le cri inaudible de la carotte que l'on pèle, celui de la poire dans laquelle on mord à pleines dents, vous y pensez parfois? 

J'ai longtemps rêvé que la science nous permettrait un jour de nous nourrir de petites pilules seulement, sans tuer qui ni quoi que ce soit… J’attends toujours... mais je mange, du bout des lèvres, il le faut bien!

Image par -Rita-👩‍🍳 und 📷 mit ❤ de Pixabay