TW - Abus sexuel et IVG -
Je suis partie très tôt, seule malgré
l'événement qui m'attendait et malgré l'absence de l’accompagnatrice. Elle
n'est jamais arrivée.
Ce rendez-vous dont on fait tout un drame
me laisse de glace, ce n'est rien. Il n'y a que l'aspect médical qui
m'inquiétait, les risques liés à toute intervention sur le corps me tiennent
loin des bistouris, m'assurant de ne jamais faire rectifier (quel mot
inapproprié) mon nez ni augmenter mes seins!
Alors, le retrait de cet ajout indésirable
à ma personne ne me portait pas à des remises en question. Je ne voulais pas,
et je n'aurais pas d'enfant à ce moment de ma vie où tout partait en cacahouète,
fin du débat moral.
Mais j'étais bien seule avec ça, comme je
l'étais dans ma vie alors que je venais de me défaire du père présumé, un
parfait imbécile et un être totalement dépourvu d'empathie. Je ne voulais ni ne
veux plus avoir à faire avec lui, sous aucun prétexte.
On me fait cependant sentir qu’il serait
plus acceptable que je me flagelle et que je pleure toutes les larmes de mon
corps hijacké par un étranger. Je ne
ressentais pas ces émotions torturantes et je n'avais aucun doute au sujet de
ma décision. C'est non, je ne voulais pas être mère en ce moment, clair comme
ça. Mais j'étais inacceptable dans mon assurance.
L'infirmière me reçoit. Elle voudrait remettre
tout ça en question, que je démontre au moins un signe de remords... Désolée,
il n'y en a pas, je suis très à l'aise avec ma décision. Devoir convaincre les gens m'étonne et je me
sentais de plus en plus anormale, émotivement inadéquate. Quand même on ne
parle pas de tuer un enfant pour qui j'ai développé de l'attachement, mais d'un
petit pois de provenance pratiquement inconnue, alors, les histoires de mère
éplorée, à d'autres!
On procède. C'est impersonnel, froid,
personne ne m'adresse la parole, c'est bien parfait, je n'aurais su quoi dire.
Toute l'équipe médicale devait maintenant savoir que je suis une psychopathe
sans cœur et sans morale. Je me sentais
flotter dans un entre-deux étrange, je dissociais. On me transféra dans une
salle où des femmes gisaient. J'avais plus ou moins conscience de ce qui se
passait là, mais il y avait ces torrents de larmes auxquelles on voulait bien
me voir participer. J'ai remis ma petite
robe d'été à fleurs minuscules. Je me suis assoupie un peu.
C'est l'accompagnatrice, qui m'a réveillé.
Elle me ramena chez moi. J'avais du sang plein la robe, comme si je sortais
d'un abattoir. J'aurais dû garder la jaquette d'hôpital, j’étais trop pressée
d'en finir. Une fois rentrée, des crampes très inconfortables m’ont gardé au
lit.
À la nuit tombée, il est entré avec un
double de ma clé, fabriqué à mon insu.
Il m'a réveillé avec des caresses non désirées. J'ai refusé, lui ai
demandé de partir. Il m'a forcé, malgré la douleur, malgré les risques, malgré
mes cris. J'ai eu peur, j'ai eu mal, j'ai cessé de me débattre, j'ai laissé
aller pour que ça se termine au plus vite.
Deux ans plus tard, en cour, le juge lui a
donné le bénéfice du doute... je pouvais mentir pour toutes sortes de raisons
hors sujet. Surtout qu’agir ainsi suite à un arrêt de grossesse ne fait aucun
sens, ce n’est pas humain!
Ne cherchez plus le traumatisme, il est là.
Ne m'approchez pas.
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Image par 1162835 de Pixabay |
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