Passer au contenu principal

Gros week end... mais je dois parler du retour (2-3 octobre)

C'est difficile de garder le cap vers le passé, même récent, quand des événements nouveaux s'amènent sur le parcours.

Ce week-end, nous avons enfin eu l'occasion de visionner le film Catimini, de Nathalie St-Pierre, pour lequel ma belle Joyce a obtenu un rôle au printemps 2011.  C'est dans le cadre du Festival du Nouveau Cinéma que nous avons finalement pu voir le produit fini, et, même avec un parti-pris certain (môman oblige), j'ai beaucoup aimé.  C'est un film dur, triste, mais le sujet, les cruautés au quotidien, mine de rien, est traité tout en nuances.  Ce fut un beau moment que de voir toutes les filles (et le garçon) rassemblées à nouveau sous le regard de Nathalie St-Pierre, qui leur a offert à toutes, en les choississant pour incarner ses personnages, une expérience hors du commun.

Une partie de l'équipe de Catimini au Festival du Nouveau Cinéma
(Joyce est à droite, veste rouge et magnifique sourire)

Revenons donc à Haiti, si ça vous dit encore.  Parce moi je n'ai pas fini mon petit voyage, j'ai encore à vous jaser de mon retour.

Le lendemain de la fiesta improvisée sur la plage, je me suis sentie totalement vidée.  Énergie à zéro, maux de tête, nausées.  Ce n'est pas une journée à se remémorer.  J'errais sur Piano Piano comme une âme perdue, de ma chambre à la table à manger, de la table à manger à ma chambre.  Mémé me réconforte en me disant que le corps qui réagit aux nouveaux microbes rencontrés depuis une semaine, au changement de température.  Moi, je pense que c'est probablement parce que j'ai du, sans m'en rendre compte, dépasser mon quota de Prestige, fixé à trois par jour selon la règle du gros bon sens, mais aussi parce que je n'ai pas bu assez d'eau.  Bref, une modite journée plate à chier!

Au souper, je me force un peu, je sais qu'on attends des gens.  Je ne les connais pas, mais c'est toujours agréable de rencontrer de nouveaux visages.  Il s'agit d'un couple d'Américain, autour de 75 ans, installés à Jacmel aussi pour je ne sais plus quelle raison.  Ils tiennent une clinique, je crois.  Ils sont vraiment joyeux, malgré l'anecdote terrifiante qu'ils nous rapportent.  D'éventuel kidnappeurs armés auraient pénétré leur propriété, la veille.  Ils sont tous fiers de nous dire que leur gardien ne s'est pas sauvé en courant, mais qu'il a bien fait face aux malfaiteurs et leur a tiré dessus!  Tout le monde est sauf.. mais, ce qu'ils sont rassurants...Arghhhhhhhhhhh!!!  Je ne me sens cependant pas assez bien pour manger et retourne m'allonger sur mon lit bien avant leur départ.

Quand je redescend, il fait nuit.  Je règle mes dettes, car mon départ est prévu à l'aube et même avant, encore cette fois.  Nous sommes tranquillement assis quand Emma pousse un cri affolé. Son minuscule chaton bagarre fort...avec une tarentule aussi grosse que lui!!
Bon, ce sera tout pour moi ce soir, je monte dormir!  De mon nid d'aigle, j'entends les filles rire et crier.  J'apprendrais plus tard que Gogo a pris l'affreuse par une patte et l'a lancé au bout du jardin.  J'aurais hurlé aussi!!!

Mais, ma dernière nuit à Jacmel est tout sauf reposante.  Un orage éclate, coups de tonnerre assourdissants, éclairs et tout le tintouin.  Il pleut comme c'est pas permis.  Je suis au milieu de mon lit, ramassée en boule et j'attends, j'attends.  Mais ça ne finira donc jamais?  L'orage tourne autour de Piano Piano, va et vient, la foudre semble tomber partout.  J'entends mais je suis sourde, je vois mais je suis aveuglée.  Une accalmie enfin, la pluie semble ralentir, mais ça reprend de plus belle pour je ne sais combien de temps.

Finalement, Gogo m'appelle, l'heure du départ est arrivée.  Dernier café, derniers bisous et dès 5h, nous sommes sur la route montagneuse qui mène à Port-au-Prince.

Une route de montagne la nuit, c'est impressionnant, surtout sans autre éclairage que les phares de voitures que nous croisons.  Les notres diffusent une aura glaucque nous permettant de distinguer une procession de marcheurs fantômes sur le bas coté, adultes et enfants se rendant à leurs occupations du jour.  Une voiture est renversée à un angle de 45 degrés, dans la petite ravine coté montagne.  L'homme attend hors de son véhicule et Gogo s'arrête pour s'assurer qu'il va bien.  L'homme nous dit que tout est ok, il s'est endormi!  Heureusement qu'il n'a pas pris le coté opposé, il serait certainement mort, la descente à pic vers la vallée semblant fatale.  Comme il n'y a plus de radio pour nous distraire, nous causons, Gogo et moi.  Il me parle de ses amours compliquées, des gens qui vont et viennent, promettant un retour qui tarde toujours trop, et qui souvent n'arrive jamais.  Le soleil se lève enfin alors que nous sortons de la montagne.  Nous sommes tout près de Port-au-Prince.

Gogo doit voir quelqu'un dans un poste de police et je me dis que c'est l'endroit idéal pour faire imprimer mon billet de retour, que je ne retrouve plus.  On nous dirige à l'étage, où des hommes très sérieux, en uniformes, nous regardent de haut.  Gogo s'adresse à l'un d'eux qui travaille à un clavier.  L'homme est mécontent et commence à parler très fort.  Je ne suis pas certaine de ce qui se passe, mais j'aime pas, quand tout à coup, je comprends tout!  Le monsieur considère que nous avons omi les préliminaires à notre demande!!!  Oh, que c'est chou!!!!   Et que je me fend de mon plus beau sourire pour me présenter et lui expliquer la situation, après quoi, le monsieur tout sérieux s'empresse de répondre positivement à ma requête, lui aussi avec un fantastique sourire (enfin!), dans lequel je crois déceler un petit soupçon de moquerie. 

Retour dans la voiture.  Gogo s'arrête et fait monter un autre gars.  Nous roulons encore un peu quand tout à coup, Gogo tire une tronche d'enfer et se colle au trottoir.  Un autre officier, celui-là encore plus sérieux que l'autre si c'est possible, mais en plus, avec un petit quelque chose d'inquiétant et de dangereux (son doigt qui caresse le chien de son arme pendue à son cou) alors qu'il parle très vite et de manière pas du tout engageante. Gogo sort de la voiture pour aller je ne sais où, son copain le suit peu de temps après.  Ça dure longtemps ce moment, seule dans la voiture à regarder la vie qui coule de tous les cotés de cette rue.  Je vois un clochard qui boit à même le caniveau, une fille portant des talons hauts qui ne fait aucun secret de ce qu'elle offre.   J'observe les chiens errants, les vendeurs d'eau.  Quand Gogo et son copain reviennent, il est question d'une vignette échue qui devait être renouvelée le premier du mois.  Pénalité, écot payé au policier.

Photo: HaitiNews



Nous arrivons enfin chez Gogo, où, avant d'aller à l'aéroport, je passerais quelques heures tranquilles à lire au soleil en compagnie d'une poule et de ses cinq poussins alors qu'il vaquera à des occupations qui attendaient impatiemment son retour.

Une fois à l'aéroport, à ma grande surprise, tout va très vite.  À l'étage, je bois une dernière Prestige en compagnie d'un autre Québécois qui revient, Denis.  Policier, il a travaillé pour la Minustha il y a déjà quelques années, mais il me raconte qu'il revient depuis, deux fois par an, par plaisir, pour visiter, pour aider ses amis haitiens à construire leurs maisons.  Cette fois-ci, il a fait le voyage jusqu'à la Citadelle Laferrière et son récit m'a fait rêver, moi et ma hantise des hauteurs!  Le trajet de Port-au-Prince à Jacmel me semble une partie de plaisir comparé à ce qu'il me raconte.

Photo: Tout sur google earth.com

Quelques heures plus tard, je peux poser mon sac et me mettre à tout raconter à l'homme qui est resté en charge de ma vie au Québec, rendant ce petit voyage possible.  Mon premier souhait: Un bain chaud!!!  C'est ben pour dire!!

Je suis vraiment heureuse d'avoir visité une petite partie de ce très beau pays, malgré tous les malheurs qui l'accablent et d'avoir rencontré des gens souriants, heureux de la vie qu'ils ont.  Oui, il y a de la misère, oui, il y a place à beaucoup d'améliorations, particulièrement à Port-au-Prince, où il semble que rien n'avance, rien ne bouge.  Mais comment ne pas tomber en amour avec une joie de vivre si palpable, une conscience de l'éphémère qui amène l'être à se vivre au présent, constamment.  C'est une leçon de vie que j'ai reçu et pas seulement de beaux souvenirs de carte postale.  Mais, je ne peux certainement pas dire que je connais Haiti, pas en si peu de temps!! 

Je  tiens particulièrement à remercier Mémé de m'avoir si chaleureusement accueilli dans son coin de paradis.  J'avais beau être curieuse depuis longtemps au sujet d'Haiti, ce n'est pas une destination que j'aurais choisi de visiter seule (et même en couple ou à plusieurs), sans personne pour m'accompagner dans le pays.  Marie fut une guide précieuse et totalement disponible.  Sa connaissance parfaite du créole est un atout certain et sa bonne humeur constante un plaisir incomparable, surtout après une couple de Prestige...;-))) 

À la prochaine, ma belle Mémé!!

Commentaires

  1. Merci à toi d'être venue me visiter. Sérieux, ce fut un immense plaisir de te rencontrer.

    Welcome back anytime! (au pire, on boira plus de lait!)

    RépondreEffacer
  2. Du lait??? Tu veux vraiment que je sois malade! Nan.. suis accro à la Prestige, là!

    RépondreEffacer
  3. Merci pour ce récit, pour cette petite tranche de vie de tout là-bas... pour moi, Jacmel, c'était il y a longtemps, mais... c'était bien... Merci de m'avoir fait "revoir" Raymond, Cyvadier,...
    Marie

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Ça me fait plaisir...Ce ne fut qu'un très court voyage qui m'a tout de même permis de voir un peu de ce que l'on ne voit pas aux nouvelles.

      Effacer
  4. en plus le lait coûte 3 fois le prix de la Prestige et du Barbencour !!

    Donc par soucis économique, vive la Prestige!!

    Disponible à la SAQ en passant!

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Oui, j'ai su ça... Dès mercredi, dernière journée d'antibiotique, je cours m'en procurer! ;-D

      Effacer
  5. Merci Johanne. Quelques jours racontés qui m'ont donné l'impression d'un plus long voyage. Te raconter ainsi, m'ouvrait une perspective plus grande que les paysages dépeints, les expériences exprimées et vécues. Le sentiment de voir à travers tes yeux ce 360 degrés quotidiens, vivant, réel à quelques milliers de kilomètres, simplement par la lecture... :-)

    RépondreEffacer
  6. Merci à toi de nous avoir accueilli dans ton récit. J'aime toujours te lire ;)

    RépondreEffacer

Publier un commentaire