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Lectures d'hiver

J'ai raconté il y a un petit moment, ma visite au Salon du Livre et l'achat de bouquins qui en découla. J'ai lu, tout... presque tout... Parce que j'en ai donné aussi, sans les lire avant, me disant que j'aurais bien une occasion de retrouver ces pages dans un autre temps.

Présentement, je suis à achever L'énigme du retour, de Laferrière et je me retrouve sous le charme, entièrement, totalement, à un point que je n'espérais plus ressentir depuis longtemps. Et je lis les critiques parues sur ce livre. Elles me laissent sur ma faim. Oui, on y dit que le roman est excellent, on lui attribut toutes les petites étoiles disponibles... mais aucune de ces critiques ne me parle de ce que, moi, je ressens, face à cette lecture. Et je ne sais même pas si je pourrais le faire moi-même.

L'énigme du retour nous amène avec son personnage principal en Haïti, terre natale de l'auteur et narrateur. Les descriptions des paysages sont exceptionnelles et colorés, il faut bien s'y attendre, mais les sentiments que l'auteur exprime pour ses habitants le sont encore plus. La tendresse du regard qu'il porte sur sa famille et ses compatriotes demeurés au pays me semble incommensurable, d'une beautée et d'une compassion pleine de respect et de tristesse. Les mots qu'il choisit pour nous la faire ressentir sont finement ciselés, d'une justesse terrifiante. La pauvreté, la misère, la fierté, la douleur, la dignité, l'injustice nous sont lancés à la figure d'un geste assuré qui ne rate pas la cible. Pas d'emballement ici, pas de grande envolée lyrique, mais une économie sobre. Les mots choisis sont efficaces, d'une justesse parfaite:

Avez-vous déjà pensé à une ville
de plus de deux millions d'habitants
dont la moitié crève littéralement de faim?
La chair humaine, c'est aussi de la viande.
Pendant combien de temps un tabou
pourra-t-il tenir face à la nécessité?
(p.85)

On a aucune idée
de l'effet de l'argent neuf
sous les yeux
dans un pays ou l'ouvrier gagne
moins d'un dollar par jour.
(p.88)

Quelque chose bouge là-haut.
Une petite fille en train
de grimper la montagne
avec un seau d'eau sur la tête.
Ici on vit d'injustice et d'eau fraîche.
(p.96)

Ce que je perçois au cours de ma lecture, c'est la culpabilité latente de l'auteur. Coupable d'avoir choisi l'exil et un monde 'meilleur'. Coupable de laisser les autres se demmerder avec l'espoir pour tout bagage. Coupable d'être devenu un étranger dans son propre pays... et de demeurer un étranger dans son pays d'adoption. Cesse-t'on un jour d'être un immigrant?? J'en doute.

L'énigme du retour est une grande quête qui demeure sans réponse. Un peu comme Hamlet avec son 'Être ou ne pas être', Laferrière ne répond pas à la question 'Partir ou rester'. En fait, il la chevauche.

Mais bon, je peux me tromper, je n'ai pas encore tourné la dernière page...;-)

Commentaires

  1. Jo,

    Nous venons tous, toutes d'Afrique. Nos ancêtres son arrivés ici trois ou quatre mille ans après les Premières Nations et un grand nombre s'est comporté en roi et maitre, avec la Vérité.

    Pourtant, ne sommes-nous pas toutes et tous des immigrantes et des immigrants? Et sur le plan métaphorique, des étrangères et des étrangers partout où l'on va, même avec des aires de familiarité?

    Tiens un souper du temps des Fêtes... Rempli d'étrangères, d'étrangers familières/ers...

    Une merveilleuse année, que je te souhaite aussi chez moi, chère Jo, Zed ¦)

    PS : Très jolie ta carte d'affaires. La meilleure des chances.

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