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Long time no see

Ce fut un long et dur hiver.  Nous avançons lentement vers le redoux, mais le mouvement est ralenti par des neiges annoncées, des lourdeurs imprévues.

J'ai lâché mes cours pour cause d'écoeurite aïgue et même si parfois j'ai une sensation de regret qui se pointe, je la tasse vite pour me remettre en tête les multiples frustrations de ce second semestre.  J'ai envie de m'amuser, je suis assez vieille pour faire ce que je veux et voilà.  Je ne m'amusais pas.  Il n'est pas dit que je n'y reviendrais pas un jour, mais cette session d'hiver, de froid et de soir, de par coeur et de grève a eu raison de mon intérêt.

J'ai quand même écrit durant ce semestre et des trucs que je trouve assez bien.  Si on me demandait mon avis sur le certificat de création littéraire, je suggérerais que des ateliers et rien d'autre.  C'est là qu'on pousse nos limites, qu'on échange et qu'on avance.

Voici donc le premier texte écrit en janvier.  Déprimant mais je l'aime bien quand même...





Revenir à la vie…

Ses yeux refusent d’en fournir l’effort.

À quoi bon s’ouvrir encore?

La nuit devrait lui sceller les paupières pour de bon.
Les draps rêches, humides de mauvaise sueur, collent à sa peau— se déplier, s’extirper d’eux est une bataille récurrente : Prière muette (pour une fois, mon Dieu) d’en rester prisonnier.

Souffrance.

Ses pieds roulent plus qu’ils ne marchent.  Leurs articulations, usées comme la trame laineuse couvrant le plancher crasseux, protestent. Il urine debout, sans viser, dans un état second.  Le jet chaud éclabousse le pourtour de la faïence cloutée de rouille.  Il s’en fout. Au sol, une souillure aqueuse et nauséabonde efface le motif des tuiles. La brosse à dent sur le coin de l’évier se couvre d’un duvet blanchâtre, tout comme son menton hirsute, reproches du temps passé à se négliger. 

Entre les rideaux défraîchis, un ciel                Pupille atone s’embrasant dans le reflet
jaunâtre lui tombe sur la gueule sur fond               du voyant rouge.  Crépitement liquide
d’asphalte monocorde.  Partout, des                       sur les parois de verre de la carafe.
cadavres métalliques aux teintes criardes.              L’odeur fade et grasse soulève le cœur.
Des mouettes bruyantes tournoient                          Nu, tasse à la main, il se prosterne
au-dessus du parking mouillé. Les nuages              devant l’écran du portable. 
sont là pour rester. Pression distraite sur le            Aucune hâte d’apprendre les dernières
bouton « ON » de la cafetière.                                     frasques présidentielles. 

                                    Y a-t-il encore quelqu’un pour s’en indigner?



Résigné, il plonge tête première vers l’écran plat.  Il en restera prisonnier jusqu’à la dernière

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